La pensée esthétique de l’Inde fut énoncée pour la première fois dans le plus ancien traité d’art dramatique, rédigé au début de notre ère, le Nāṭya Śāstra. Ce texte envisage l’art comme un prolongement des enseignements contenus dans les hymnes des Veda et demeure pour la tradition artistique et littéraire, la première autorité en matière d’esthétique.
Attribué au sage Bharata, l’ouvrage traite en détail de toutes les disciplines (danse, poésie, musique, mise en scène, etc.) qui participent à l’art théâtral, révélé par le dieu Brahmā. L’art y est expliqué comme étant à la fois source de plaisir et moyen de connaissance, s’inscrivant ainsi dans la continuité de la doctrine brahmanique. La théorie esthétique de Bharata repose sur la notion de rasa ou saveur qu’exprime une œuvre. Le spectateur sensible en fait une expérience délectable radicalement différente des émotions courantes qu’il peut ressentir dans la vie quotidienne.
L’expérience du rasa ne saurait être objectivée mentalement ni même conceptualisée. Elle est une gustation intuitive de l’œuvre et procure une joie ineffable.
extrait de [La délectation du rasa. La tradition esthétique de l’Inde] de Philippe Bruguière
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